Jeux du Commonwealth à Dehli : sex is business

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Mondial de football 2006 en Allemagne, Euro 2008, coupe du monde 2010 en Afrique du Sud, J.O à Vancouver… Autant d’occasions pour l’industrie du sexe de faire des affaires. Les Jeux du Commonwealth organisés à Delhi, en Inde, ne semblent pas déroger à la règle. Ils sont même en passe de s’illustrer par le nombre de jeunes filles mineures exploitées pour la circonstance.

Les jeux du Commonwealth, plus grand événement sportif sur le sol indien depuis les Jeux asiatiques de 1982, se sont ouverts le 3 octobre à Delhi pour douze jours. Comme à chaque grande manifestation sportive, femmes et jeunes filles payent le tribut habituel à la demande de « divertissement sexuel » de milliers d’hommes venus du pays comme de l’étranger. En Inde, le ministère de l’intérieur lui-même a sonné l’alerte en septembre sur la traite de jeunes filles venues des états indiens les plus pauvres, Bengale de l’Ouest, Orissa, Jharkhand, en indiquant que les mineures sont les principales cibles.

Toutes les informations concordent. Parallèlement aux autorités qui ont annoncé l’installation de deux cents distributeurs automatiques de préservatifs à 5 roupies et leur distribution gratuite aux joueurs et accompagnateurs des équipes, la presse a fait état de travaux fébriles de rénovation (avec installation de téléviseurs) dans les bordels de GB Road, le fameux quartier de prostitution de Delhi.

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Alors que les affaires des tenanciers promettent d’être florissantes, les ONG parlent de centaines, voire de milliers de jeunes filles des états ruraux pauvres, notamment du nord-est, victimes de trafics à destination du nombre croissant de bordels, salons de massage et agences d’escortes de la ville. Nishi Kant, du réseau anti traite de Delhi Shakti Vahini, a déclaré au journal australien Herald du 30 septembre 2010 que son organisation avait sauvé 54 mineures de la prostitution dans le quartier rouge de la ville et la gare toute proche durant les six semaines précédant les Jeux.

Un surintendant de police d’un des districts de Delhi donne le chiffre de 80 jeunes filles arrachées aux bordels et aux trafiquants ces six derniers mois. Un porte parole de l’organisation Apne AAp souligne quant à lui une augmentation substantielle, dans les journaux, du nombre de petites annonces pour les bordels, services d’escortes et salons de massage, comparé à l’année 2009 ; services d’escortes qui comptent manifestement sur des arrivages de femmes en provenance d’Europe, de Russie ou d’ailleurs, et en possession de visas de tourisme.

C’est dans ce contexte que la Marche Mondiale des Femmes qui œuvre à l’élimination des causes profondes de la pauvreté et de la violence à l’égard des femmes, a adressé une lettre de protestation à la Présidente de l’Inde, Prathiba Patil, et à la gouverneure de l’Etat de Delhi, Sheila Dikshit, pour leur demander instamment de prendre des mesures strictes contre les trafiquants et de ne pas laisser leur pays abriter un carnaval sexuel indigne, fondé sur la traite des femmes et des enfants.

Saluons cette initiative, même sans illusion. De plus en plus de voix se font entendre pour dénoncer cette collusion rentable et cynique entre manifestations sportives et esclavage sexuel. Le silence est au moins brisé.