Abolition n’est pas prohibition!

1954

À entendre leurs détracteurs, les abolitionnistes seraient des partisans de la répression. Leur but ? Interdire la prostitution, et pour des raisons tenant à «la morale». Cette confusion avec la rigidité des prohibitionnistes est sciemment entretenue : une arme parfaite pour disqualifier les positions abolitionnistes, qui font obstacle à la libéralisation des profits liés au commerce du sexe.

Les prohibitionnistes (USA, Chine, pays arabes) se contentent en effet d’interdire et de réprimer des individus, en priorité les personnes prostituées. Leur objectif est simple : invisibiliser une réalité qui les gêne, sans se donner les moyens de la transformer. Le résultat ? Une clandestinité parfaitement hypocrite que chacun fait semblant d’ignorer.

Les abolitionnistes se battent précisément pour l’inverse : l’abrogation de toute forme de répression à l’encontre des personnes prostituées, qu’ils ne confondent pas avec leurs exploiteurs, clients prostitueurs et proxénètes.

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Car les abolitionnistes sont forts d’une vision d’ensemble qui manque aux partisans de la répression pure et simple. En mettant à jour le fait que l’argent est, après l’inégalité de droits et l’usage de la violence, le nouveau levier de la contrainte, et d’abord pour les femmes, ils analysent la prostitution comme obstacle à l’égalité entre les femmes et les hommes. En qualifiant la violence prostitutionnelle, ils proposent un éventail de mesures concrètes qui appellent à des changements sociaux, politiques et culturels et s’inscrivent dans un projet de société progressiste.

Loin de vouloir réprimer pour réprimer, ils n’envisagent pas de responsabiliser pénalement les clients prostitueurs si un arsenal de mesures de protection, d’accompagnement et d’alternatives n’est pas préalablement garanti aux personnes prostituées. Seul le souci de cohérence les guide : comment construire un programme de prévention de la prostitution, d’éducation à l’égalité entre les filles et les garçons et à une sexualité respectueuse de l’autre et de son désir, si les clients prostitueurs ne sont pas l’objet de mesures claires de dissuasion ?

Au delà de la protection des personnes concernées, le but ultime des abolitionnistes est l’affirmation de principes universels visant à protéger chacunE, et notamment le principe d’intégrité et de dignité. Ce n’est qu’en libérant la sexualité de l’emprise du marché, cet ultime masque de la contrainte, que la liberté sexuelle pourra être garantie pour toutes et pour tous.