En Angleterre, le syndicat International Union of Sex Workers (IUSW) est ouvert à toute personne appartenant à l’industrie du sexe
... et donc aux managers
. Ainsi, son représentant, un certain Douglas Fox, qui se dit escort boy
, est en réalité le fondateur, par l’intermédiaire de son compagnon John Dockerty, de l’une des plus grandes agences d’escortes
de Grande-Bretagne [1].
Cette porosité entre personnes qui se présentent comme prostituées et tenancierEs ayant intérêt à la décriminalisation de l’industrie est omniprésente. En Suisse, la tenancière Madame Lisa s’affiche en tant que pute et fière de l’être
, alors qu’elle dirige le plus grand bordel de Genève, le Vénusia. Au Canada, Terri Jean Bedford, qui a intenté un procès à l’État en 2009 au nom des intérêts des travailleuses du sexe
, a été condamnée en 1998 pour avoir tenu un bordel.
Que ces proxénètes aient pu être prostituéEs à un moment de leur vie ne change rien à leur statut de proxénète et donc de patronNEs. Comment ne pas voir que ce statut renverse leurs objectifs, qu’il substitue la défense de l’industrie à la défense des personnes que cette industrie exploite [2] ?
On devrait se souvenir de Coyote, premier syndicat de prostituées
fondé par Margo Saint James à San Francisco en 1973. Elle-même, condamnée en 1962 pour proxénétisme, se présentait comme prostituée, ce qu’elle ne fut que très brièvement. On sait aujourd’hui que son syndicat
comptait, de son propre aveu... 3 % de prostituées [3]. Le reste étant, semble-t-il, un puzzle de clients, gens de médias, politiciens et libéraux de toute espèce.
À l’heure où le Strass, syndicat du travail du sexe
, entend s’imposer en France comme représentant des personnes prostituées, posons les questions qui fâchent. Ouvert à toute personne amenée à échanger un service de nature sexuelle moyennant contrepartie
, il accueille aussi toute personne salariée, ou indépendante, ou travaillant pour son propre compte exerçant une activité liée à la sexualité
, et même, comme sympathisants, toute personne physique
.
Comment fait-il alors pour ne pas amalgamer patrons de bars ou de salons de massage, "clients", producteurs de films porno et « simples » personnes prostituées ?
Depuis quand un patron et la personne qu’il fait travailler défendent-ils les mêmes intérêts à l’intérieur du même syndicat ? Le terme "syndicat" est-il le bon dès lors que le Strass milite pour l’abrogation des lois sur le proxénétisme ? Et de quelle légitimité un tel "syndicat"peut-il se prévaloir ?
Cette posture imitant les codes de la gauche syndicale, à la pointe de la défense d’une minorité opprimée, est un cheval de Troie idéal pour le patronat de l’industrie du sexe, une pièce maîtresse de son arsenal politique. Quel meilleur masque à son travail de sape des lois punissant le proxénétisme, dont le déverrouillage ouvrirait la voie à de juteux profits ?