La crise économique fait le bonheur des proxos

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Au fil d’articles alarmants traitant des effets de la crise économique sur l’industrie du sexe, les médias de tous pays n’en finissent plus de redécouvrir les contraintes et les pressions qui prennent à la gorge les personnes prostituées.

De Bangkok à Berlin, les temps sont durs pour le commerce du sexe, titre le Time[From Bangkok to Berlin, Hard Times Hit the Sex Trade, Time, 28 mai 2009. Toutes les citations proviennent de cet article.]]. Des solutions grotesques sont expérimentées dans les bordels des pays reglementaristes : nous avions évoqué ici même[[Voir [].]] ce bordel allemand proposant un forfait tout compris – bières, burgers, femmes à volonté ; un autre invite le « consommateur » à venir déguisé et muni d’un œuf peint pour profiter d’une prostituée gratuitement à l’occasion de Pâcques.

Au-delà de ces humiliantes manoeuvres imposées aux femmes par leurs proxénètes, il semble que ceux-ci pourront bientôt remercier « la crise » et le surcroît de pression qu’elle fait peser sur les personnes prostituées. Les « clients » prostitueurs, eux aussi, l’ont bien compris, confie à l’AFP[[Cash crunch hits Amsterdam’s red-light district.]] une jeune femme estonienne prostituée à Amsterdam, ils nous montent les unes contre les autres [pour faire baisser les prix].

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La casse des prix habituellement pratiqués devient la norme dans les bordels néerlandais et allemands, qui banalisent la formule « au forfait » et obligent les personnes prostituées à fournir de nouvelles prestations, ainsi que l’énonce au Time la manager d’un bordel nommé avec à-propos le « Yes, sir[[Oui, Monsieur.]]».

De manière générale, les proxénétes visant à attirer « l’homme du commun », comme l’explique un propriétaire de bordels néerlandais au journal américain, s’enrichissent ces jours-ci en fournissant de nombreuses femmes pour un coùt modique, à une armada de « clients » peu regardants, qui ont délaissé les bordels plus luxueux.

En un mot, les macs feignent de redécouvrir les avantages de la prostitution à l’abattage.

« Industrie » peu coùteuse en infrastructure et facilement déplaçable, le commerce du corps des femmes peut aussi être délocalisé au plus grand profit des proxénétes. Au temps des compagnies aériennes bon marché, le système exploite… la variation des taux de change des monnaies.

Ainsi, l’hryvnia, la monnaie ukrainienne, qui a dévalué de 40% par rapport à l’euro et au dollar. Depuis, ce pays est devenu le paradis du tourisme sexuel, sous nos yeux, selon Yuri Lutsenko, ministre de l’intérieur ukrainien. La police ukrainienne table sur une explosion des profits réalisés par les proxénètes, qui dépasseraient le milliard de dollar cette année.

Priez pour nous, suggère au Time la propriétaire d’un sauna thaïlandais touché par la « crise ».

Les macs européens investissant l’Ukraine auraient-ils « prié » avec beaucoup de ferveur? À moins que leur bonne fortune ne s’explique plutôt par la complaisance des hommes prostitueurs, venus exercer leur pouvoir économique démesuré sur les femmes ukrainiennes qu’ils se sont empressés de leur fournir.

Une fois que la demande est assurée, quoi de plus simple que de créer l’offre, en s’aidant de la persistance, voire, crise oblige, de l’aggravation des inégalités et des violences sexistes ? Anna Hutsol, présidente de Femen, une ONG de défense des droits des femmes, décrivant les difficultés écrasantes auxquelles sont confrontées les femmes ukrainiennes, prévoit une brutale poussée d’exploitation : Il y a d’un côté des filles sans travail, et de l’autre, des étrangers plein d’argent qui veulent des prostituées.