Convention d’Istanbul sur les Violences faites aux femmes : et la prostitution ?

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L’Assemblée Nationale a définitivement adopté le 5 mai 2014 le projet de loi autorisant la ratification de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre les violences à l’égard des femmes et la violence domestique.

Les sénateurs ont donc voté sans traîner et à l’unanimité ce texte déjà adopté par l’Assemblée le 13 février et qui entrera en vigueur le 1er aoùt 2014. Cet élan unanime – que l’on aimerait voir à l’œuvre pour la proposition de loi sur le système prostitutionnel votée par l’Assemblée le 4 décembre 2013 – tient manifestement au fait que la prostitution est la grande oubliée de ce texte qui, excellent par ailleurs, cible les mariages forcés, les crimes dits d’honneur, les mutilations génitales, le viol utilisé comme arme de guerre, etc.

Négocié au sein du Conseil de l’Europe, instance où l’Allemagne et les Pays-Bas protègent chèrement leur droit d’exploiter la prostitution d’autrui, toute référence à la prostitution comme violence était de facto exclue.

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Un « oubli » dùment dénoncé

Il est donc important que cet « oubli » majeur ait été souligné par certaines de nos sénatrices. Laurence Cohen, sénatrice CRC (Groupe communiste républicain et citoyen), qui a parlé d’un moment important pour les femmes, a relevé le paradoxe voulant que notre parlement, qui d’un côté s’apprête à adopter un texte contre la prostitution rappelant fort justement la position abolitionniste de la France, vote de l’autre cette convention internationale qui n’en dit mot. Selon elle, ce manque fondamental de la convention ne constitue bien évidemment pas un oubli, mais une acceptation politique, de la part de certains, de cette violence. De même, la sénatrice Brigitte Gonthier-Maurin (CRC), présidente de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, a salué le premier instrument contraignant de lutte contre les violences faites aux femmes en regrettant qu’il y manque la prostitution.

Pourtant, briser la loi du silence, la honte pour les victimes et l’impuissance des autorités à poursuivre les auteurs des violences, but de cette Convention selon la sénatrice PRG Françoise Laborde qui en résume la stratégie en trois « p », prévenir, protéger et poursuivre, s’appliquerait parfaitement à la problématique prostitutionnelle et à l’abandon auquel sont condamnées ses victimes.

Souhaitons que le vote historique, le 8 avril 2014, de la Résolution relative à la prostitution, à la traite et à l’esclavage moderne par l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe – qui appelle à pénaliser les acheteurs d’actes sexuels – rende impossible ce type d’ «oubli» à l’avenir…